Je me souviens
Je me souviens, enfant, être venue au Pouhon, avec ma cousine Bernadette, remplir les bouteilles de Marraine.
L’eau était fraîche et délurée, comme moi. J’aimais son petit goût de métal ainsi que le dépôt joliment cuivré sur les parois de verre.
Temps béni des vacances où je glissais mes pas dans Spa !
Béatrice Libert.
Moi rivière
Je suis témoin de leurs étreintes aux abords de mon lit. Je suis l’eau de leurs bouches. Je ris de leurs ébats… Je vous éclabousse, jeunes impudiques qui n’avez pas quinze ans ! Le feu de vos reins m’évapore doucement et je deviens légère, cotonneuse pour m’élever très haut rejoindre les nuages… J’y frisonne… Peut-être retomberais-je sur d’autres enfants soudés près d’un courant ?
France Parys.
Le Funambule (consigne : introduire le mot «puits »)
Dans ce rêve, il est un funambule en fragile équilibre au-dessus d’un puits insondable
Un pas pour lâcher prise
Quatre pas pour passer cette eau morte
Huit pas pour retrouver la source vivante
Dix pas, dix pas seulement pour aller de l’ombre à la lumière
Siska Moffarts.
Premier émoi
Je me souviens – mais c’est si loin que mon souvenir se mouille à l’eau du temps – je me souviens des bains que ma mère m’administrait les jours de grand soleil quand l’air était tiède et que la fraîcheur liquide ne risquait pas de m’effaroucher.
Elle avait préparé, à la terrasse et sous la véranda, une grande cuve ovale en galvanisé accotée d’un tabouret sur lequel était posé une large éponge brune, une de ces vraies éponges comme je n’en ai plus vu ensuite qu’aux mains d’un ancien peintre qui lavait les plafonds. Elle faisait couple avec une brique de savon de Marseille et s’acoquinait d’un redoutable gant de crins. Au dossier d’une chaise de jardin laquée blanc et rouge pendait à cheval un ample essuie-éponge qui me souriait d’avance.
La scène était prête.
Je ne m’affolais pas des hautes cruches pleines d’eau tiède qu’elle s’apprêtait à me verser sur la tête : j’avais déjà vu, banale, la gravure où l’on voyait Jean Baptiste inondant Notre Seigneur de l’eau baptismale. Non, je savais que l’eau était tiédie, les frissons, les contorsions (qui mouillaient ma mère agacée) me venaient d’ailleurs. Tout nu sous l’ablution, je guettais de la terrasse le voyeur qui, d’une fenêtre d’en face, aurait pu détailler ma jeune anatomie.
Michel Gelin
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